Crise politique dans la Région bruxelloise : voici la chronologie du record mondial sans gouvernement de plein exercice

par | 3 Déc 2025 | Actualité de Bruxelles

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Bruxelles en suspens : vers un record mondial d’absence de gouvernement

En dépassant les 542 jours sans gouvernement de plein exercice, la Région bruxelloise s’apprête à battre un record mondial peu enviable. Cette impasse politique, née des élections du 9 juin 2024, pèse sur la gestion des services publics, la confiance des citoyens et la crédibilité de Bruxelles comme capitale européenne.

Un record mondial d’immobilisme

Le 4 décembre 2024, la Région bruxelloise aura passé 542 jours sans véritable exécutif, soit un jour de plus que le précédent record belge de 541 jours détenu par le gouvernement fédéral entre 2010 et 2011. La capitale de l’Europe prend ainsi la tête d’un classement dominé par la Belgique, qui occupe également la troisième place avec les 493 jours d’absence de gouvernement fédéral en 2020-2021. À l’échelle internationale, seul le Liban (396 jours en 2021) et le Cambodge (354 jours en 2004) figurent dans le top 5. Cette statistique met en lumière la difficulté récurrente des acteurs politiques belges à forger des coalitions stables.

Les racines d’un blocage bruxellois

Bruxelles, ville bilingue et siège de nombreuses institutions européennes, reflète la complexité du système belge, fondé sur la coexistence de trois régions linguistiques. Les élections régionales du 9 juin 2024 ont renforcé la fragmentation de l’assemblée : MR, PS, Ecolo, DéFI, PTB et autres petits partis se disputent des blocs presque équivalents, sans qu’aucune alliance ne réunisse une majorité claire. Sur fond de rivalités communautaires, chaque camp redoute de céder trop de terrain sur ses priorités idéologiques, qu’il s’agisse de sécurité urbaine, de logement social ou de mobilité.

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Conséquences pour les services publics et l’économie

Concrètement, l’absence d’un exécutif bruxellois retarde la prise de décisions essentielles. Les budgets doivent être votés sous forme de service fait, sans nouvelle ambition pour le développement des transports ou la lutte contre la pollution. Les investissements attendus dans les infrastructures, y compris les projets européens, restent en suspens, freinant l’attractivité économique de la région. À terme, l’absence de perspectives politiques claires pourrait éroder la confiance des investisseurs et accroître les tensions sociales, déjà visibles lors de la manifestation de 500 personnes qui ont défilé pour réclamer un gouvernement majoritaire.

Clivages politiques et enjeux communautaires

Au cœur du blocage, les clivages traditionnels persistent. Du côté francophone, le PS souhaite maintenir un équilibre social et financer des politiques de cohésion tandis que DéFI insiste sur une gouvernance ferme contre la criminalité. Côté flamand, le MR plaide pour la compétitivité économique et une gestion rigoureuse des finances publiques, mais se heurte à Ecolo et au PTB sur les enjeux climatiques et de redistribution. Bernard Clerfayt (DéFI) résume ce dilemme : « Il faut un gouvernement majoritaire pour prendre des mesures difficiles », mais la majorité se refuse à se former tant que chaque partie n’est pas assurée de ses garanties.

Un défi démocratique et institutionnel

Au-delà des négociations, c’est la structure même du fédéralisme belge qui est questionnée. Comment trouver un mécanisme de médiation plus efficace pour l’élection du ministre-président ou l’attribution des portefeuilles ? Faut-il envisager une loi-cadre pour limiter la durée de la crise ou revoir le mode de scrutin régional afin de favoriser des coalitions moins fragmentées ? Les experts interrogés pointent l’urgence d’une réflexion globale, tant les crises de 2010-2011 et de 2020-2021 ont montré la répétition d’un scénario similaire.

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Vers une issue et des réformes

Plusieurs scénarios apparaissent. D’une part, la renégociation des programmes pourrait débloquer une majorité MR-PS-Ecolo, moyennant un compromis sur les priorités budgétaires et environnementales. D’autre part, un gouvernement minoritaire adossé à des accords de circonstance offrirait une solution temporaire, mais risquerait de manquer de légitimité pour engager de vraies réformes. Enfin, l’idée d’une réforme institutionnelle, incluant par exemple un seuil électoral plus élevé ou un mécanisme automatique de sortie de crise, gagne du terrain chez certains constitutionnalistes. Quel que soit le chemin choisi, l’enjeu est clair : rendre à Bruxelles un exécutif capable de gouverner avant que le cap des 600 jours d’inaction ne soit franchi.

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